La clause tontine

L’actualité économique et financière avec Odin

Co-rédigé par Geoffray Matrisciano et l'équipe Odin Capital

Comprendre la Clause tontine : notion, conditions et fiscalité

La clause de tontine, aussi appelée "pacte tontinier" ou "clause d’accroissement", est une méthode d’acquisition commune où le survivant des co-acquéreurs devient seul propriétaire du bien. Cette clause, prévue dans le contrat d’achat, opère sur le principe d’un contrat aléatoire, similaire à un jeu ou une rente viagère, où les effets dépendent d’un événement incertain : la survie de l'un des acquéreurs.

Le Contrat aléatoire est prévu à l’article 1108 du Code civil et la définition se comprend aisément : « il [le Contrat] est aléatoire lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d'un événement incertain ». Dans le cas de la tontine, il y a une double condition : une condition suspensive de survie de chacun des acquéreurs et une condition résolutoire de prédécès permettant ainsi d’échapper à la prohibition des pactes sur succession future (art. 722 C. Civ.).

Bien que souvent utilisée dans des contrats de vente immobilière (tontine immobilière), la clause de tontine se retrouve également dans les contrats d’assurance-vie (tontine financière).

Quatre statues de bronze représentant les Mousquetaires (d'Artagnan, Porthos, Aramis et Athos)

Utilité et application

Principalement utilisée dans les ventes immobilières, cette clause permet d’éviter l'indivision avec la famille du co-acquéreur prémourant et d'échapper à certaines règles de succession. Depuis la réforme du droit des contrats et des obligations du 16 février 2016, la rétroactivité de la clause n'est plus automatique et doit être spécifiquement incluse. Cela peut protéger les couples non mariés et non pacsés d’une lourde fiscalité.

Conditions de validité

La clause de tontine exige un double aléa - vital (les chances de survie des co-acquéreurs doivent être égales) et économique (financement équivalent par les co-acquéreurs, même si la somme n'est pas identique pour chacun). Sans ces conditions, la clause pourrait être invalidée ou requalifiée en donation déguisée. Le bien immobilier sera donc soumis au rapport successoral et ainsi pris en compte dans le calcul du partage (en ce sens, Cass. Civ. 1ère, 10 mai 2007, n°05-21.011).

Fiscalité

En matière fiscale, la clause de tontine n'est pas sujette aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO), mais aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG) en vertu de l’article 754 A du Code général des impôts (dans le cas d’une tontine immobilière), calculés selon le degré de parenté.

Pour exemple, les DMTG pour les couples non mariés et non pacsés s’élèvent à 60% après abattement. En revanche, si les co-acquéreurs étaient mariés ou pacsés, le survivant sera exonéré de ces droits (art. 796-0 bis du CGI) depuis la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 loi dite « TEPA ». De la même manière, les frères et soeurs vivant sous le même toit que le défunt sont exonérés des droits de mutation (selon les conditions fixées par l’article 796-0 ter CGI).

L'article 754 A II du Code général des impôts introduit une nuance importante pour les biens constituant la résidence principale des acquéreurs, d'une valeur inférieure à 76 000 euros au moment du décès. Dans ce cas, le bénéficiaire a le choix entre les DMTO et les DMTG pour l'imposition liée à la clause de tontine. Pour les couples mariés ou pacsés, opter pour les DMTG est souvent avantageux grâce à l'exonération des droits de succession.

En revanche, pour les couples non mariés et non pacsés, les DMTO, avec un taux maximum de 5,81%, peuvent être plus économiques que les DMTG, taxés à 60% pour les concubins. (Articles 1594 D CGI et 1584 CGI).

En partenariat avec l'Association des Etudiants en Master Droit Notarial Européen et International (AEDNEI) de l'Université Jean Moulin Lyon III.